J’ai écrit cette nouvelle d’après le récit des péripéties d’une nuit arrosée. Ecrire des histoires dans ce genre, bon, je me suis pris pour Hemmingway, sauf que lui il était vraiment fort. Seulement j’ai pas pu resister. Finalement j’ai pas beaucoup de mérite. C’est les gens. Ils sont trop forts.

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Le Chat

Illiah entrebailla doucement la porte d’entrée, passa la main pour allumer la lampe du hall, et rentra dans la maison, avec la main devant les yeux pour se protéger de la lumière. Derrière lui, dans l’obsurité, Erié termina sa cigarette par une longue inspiration, et jeta le mégot dans les buissons mouillés qui bordaient la maison. Au moment de refermer la porte, il entendit un miaulement rauque et plaintif qui semblait provenir du côté droit du jardin.

Illiah, attends-moi une seconde, je vais voir dans le jardin, je crois que j’entends le chat de mes parents.

Je rentre, j’ai froid. Je te sors une bière ? »

Sans répondre, Erié haussa les épaules. Une bière. Après avoir avalé une quantité pareille de vodka. Rien que la pensée n’était pas loin de lui donner envie de vomir. Il avança dans le noir en regardant vers le sol. A l’angle droit du jardin, le chat était couché sur le côté, dans l’herbe humide de la première rosée, laissant échapper de petits cris mélangés de sifflements. Illiah se pencha et lui caressa la tête.

Qu’est-ce qu’il y a, le minou ?

Il n’arrivait pas l’appeler par son nom, un nom ridicule pour un chat, comme le sont tous les prénoms humains lorsqu’on les applique à des animaux. De toutes façons, celui-ci ne semblait pas pouvoir répondre ; ses yeux étaient mis-clos, (ce qui est inhabituel chez un chat, dans un jardin, vers les trois heures et demie du matin). Erié tenta de le ramasser comme il put, en formant une sorte de pelle avec ses deux mains. Le chat se débattit en miaulant, et retomba sur le sol, où il resta immobile, un peu sonné, et silencieux. Comprenant que le chat était blessé pour de bon (sans doute un choc avec une voiture, pas une de ces habituelles batailles de chats qui ne provoquent que quelques oreilles déchirées et touffes de poils arrachées), Erié se précipita vers la maison. Illiah avait terminé sa bière et commençait à s’endormir sur le canapé.

Illiah, réveilles-toi, on a un problème avec le chat !

Hein ? Quoi ? Quel chat ?

Le chat de mes parents. Il est là, dehors, dans le jardin. On dirait qu’il est blessé, et que c’est grave. Il faut l’emmener au véto.

Maintenant ? A trois heures et demie du matin ?

Oui, je sais, mais il y a des urgences vétérinaires. Je ne sais pas où, mais on va appeler les renseignements, et on ira emporter le chat pour le soigner. Mes parents adorent cette bestiole. Je vais pas le laisser crever.

Ecoute, je te laisse faire, pour les renseignements, parce que je ne sais pas si je saurais me faire comprendre.

Est-ce que tu peux pendant ce temps aller près du chat ?

Mais j’y connais rien en chat, moi !

Pas besoin de connaître les chats ! Je voudrais juste être sur qu’il ne va pas se planquer quelque part.

Ah, ok, d’accord. J’y vais.

Merci, vieux.

Erié appela les renseignements, qui mirent un temps anormalement long à répondre.

Renseignements, bonjour.

Bonjour… euh, bonsoir, voilà, j’aurai aimé avoir le numéro des urgences vétérinaires.

Quelle ville, monsieur ?

Paris 18e.

Veuillez patienter. (Quelques bruits de touches). Ah, voilà. Je vous mets en correspondance ?

Oui, s’il vous plait.

Bonne soirée, monsieur, merci d’avoir appelé.

Une voix de synthèse un peu métallique epella le numéro deux fois, puis le composa. Après quelques sonneries, le message vocal des urgences vétérinaires débita son refrain.

Urgences vétérinaire, bonjour, ne quittez pas, un opérateur va vous rép…

Allô, fit soudain une voix féminine très jeune, interrompant le message. Urgences vétérinaires, Annie à votre service, bonsoir.

Oui, bonjour… euh bonsoir, voilà, j’ai un problème avec un chat.

Il vous a mordu, griffé ?

Non, non, ce n’est pas ça, non. Bon, écoutez, je ne sais pas trop ce qui lui est arrivé, mais je pense qu’il s’est fait accrocher par une voiture. Il est couché sur le côté, il souffle, il miaule, et je…

Je vois. Il va falloir venir avec l’animal, monsieur.

C’est un chat, reprit Erié. Comment fait-on pour le transporter ?

Vous n’avez pas un panier ?

Non.

Alors trouvez un carton. Il saigne ?

Je ne sais pas trop. Il est dans le jardin, il fait sombre. Je… Je n’ose pas le porter.

Faîtes très attention. Prenez un grand carton. Venez vite avec lui.

D’accord, nous arrivons. Où c’est que vous vous situez ?

Rue des Abesses. Au 17.

D’accord. Je pense qu’à pied, on en aura pour un quart d’heure.

Erié salua, raccrocha, et sortit dans le jardin. Il faisait noir, d’autant plus que ces yeux s’était habitués à la clarté de l’intérieur. Le chat était toujours à sa place. Sa respiration sifflait plus fort. Illiah n’était pas à côté, par contre.

Illiah ! appela-t-il.

Oui, répondit une voix semblant venir du fond du jardin.

Mais qu’est-ce que tu fais ? Tu devais pas venir voir le chat ?

Oui, ben, je le cherche, ton chat. Si tu crois que c’est facile, en pleine nuit !

Viens par là. Ici. Voilà. Il est là, tu le vois ?

Là, oui. Oulah, effectivement, il a pas l’air bien du tout, le pauvre.

Je vais chercher un carton, dit Erié. On va le mettre dedans. J’ai dit à la clinique vétérinaire qu’on arrivait dans un quart d’heure.

C’est où, ta clinique ?

Rue des Abesses. C’est pas très loin.

Bon, d’accord. Je t’attends, mais fait vite, j’ai froid.

Erié se précipita en direction de la maison. Il fut encore une fois aveuglé par la lampe de l’entrée. Comme il avait bu, ses pupilles semblaient avoir encore plus de mal à se réadapter. Dans un placard en face de la porte d’entrée, il trouva un carton blanc qui avait du contenir une cototte-minute, s’il fallait en croire la décoration. Le fond ne semblait pas très solide, mais il n’avait rien d’autre sous la main, et pas le temps de faire beaucoup mieux pour l’instant. Le carton dans les bras, il sortit dans le jardin et retrouva Illiah en train de fumer à côté du chat.

Bon, aides-moi à le mettre dans le carton. Attention, il risque de se débattre.

D’accord. Comment on le prend ?

Prend le devant, et moi je soulève l’arrière train. Fais doucement.

Ils le soulevèrent délicatement et le posèrent au fond du carton. Le chat semblait un peu assomé, mais pas endormi pour autant.

Je commence à le porter pour l’instant, dit Erié, comme ils quittaient la maison. Mais on se relaiera. Le fond n’est pas très solide, il faut le soutenir avec les mains, tu feras gaffe, d’accord ?

Oui, ok, soutenir le fond, d’accord, acquiesca Illiah.

Les rues étaient désertes, sans aucune circulation. Ils marchèrent sans parler, portant le carton tour à tour, sur les avant bras. On voyait que le fond se teintait du sang qui traversait l’épaisseur.

Devant la station de métro des Abesses, il firent une courte pause pour fumer une cigarette. Sous le porche d’entrée, quelques clochards dormaient.

Arrivés devant les urgences, un panneau indiquait : “Sonnez et entrez”. Illiah, qui avait les mains libres, sonna, mais la porte ne s’ouvrit pas comme il s’y attendait. Il commença à forcer en appuyant sur la porte avec son épaule.

Attendez, ne forcez pas, c’est fermé, dit une voix derrière la porte.

Ah, d’accord, dit Illiah en se reculant.

Que désirez-vous ?

Nous avons un chat, avec nous, qui… j’ai appelé tout-à-l’heure. Ca doit faire à peine dix minutes. J’ai prévenu.

Ah, oui, je me souviens. Je vous ouvre.

La jeune fille qui ouvrit la porte semblait n’avoir même pas quinze ans. Elle était petite et frèle. Ses cheveux bruns sur son visage pâle accentuait encore cet air d’adolescente. Elle tenait un café dans les mains.

Vous êtes le vétérinaire de garde ? lui demanda Erié, regrettant presqu’aussitôt cette question.

Oui, c’est moi. Je vous semble un peu trop jeune ?

Oui, c’est-à-dire, non, enfin, ne le prenez pas mal, balbutia Erié. C’est vrai que vous semblez toute jeune.

Je suis le docteur Annie Dessois, j’ai mon diplôme de vétérinaire, et j’ai plus de cinq ans de métier. Suivez-moi, s’il vous plaît.

Elle semblait un peu vexée. Il y eut un court silence pendant qu’ils la suivaient, dans un couloir ; puis ils arrivèrent enfin dans une pièce qui semblait être une salle d’opération. La table d’examen elle-même était en inox, et en son centre, la tôle était percée de très nombreux trous. Sur le côté, un amoncellement d’outils qui faisait ressembler l’ensemble à l’établi d’un menuisier. Annie posa son café brulant sur le petit bureau au fond de la pièce.

Je suis désolé, dit alors Erié, en posant le carton sur la table. Je ne voulais pas être malpoli, ni vous faire de la peine.

Il se sentait soudain plein d’admiration pour ce petit bout de femme qui faisait des gardes nocturnes, s’exposant à la rencontre de drôles d’individus.

N’en parlons plus, lui répondit la jeune vétérinaire. Elle souriait à présent. Aidez-moi à mettre l’animal sur la table, je vais l’examiner.

C’est un chat », murmura Erié, mais elle ne semblait pas l’entendre.

Pourquoi s’obstinait-elle à dire “l’animal”, et non pas “le chat”, se demanda-t-il alors. Il lui présenta le carton en l’inclinant, et elle se saisit du chat avec des gestes qui montraient assez qu’elle avait l’habitude des animaux. Du bout de ses doigts gantés, elle lui palpa l’ensemble du corps, sans que le chat ne laisse échapper le moindre miaulement de douleur. Le sourire avait disparu du visage d’Annie, pour laisser la place à une mine concentrée, puis inquiète. Quand elle releva la tête, ses yeux étaient brillants, comme si elle retenait ses larmes.

Bon, je… on dirait qu’il a été heurté par une voiture, effectivement. Il y a des nombreuses fractures par tout le corps. Cela dit, il y a des chances, très faibles, mais des chances, pour qu’il s’en sorte. Je vais lui faire une injection de calmant pour qu’il se tienne tranquille et que celà favorise sa guérison, si possible.

Une injection ? demanda Erié.

Une piqûre, oui. Il faudra que vous m’aidiez à le tenir pendant que je lui fait cette piqûre. Il risque de se débattre.

Ecoutez, je suis vraiment désolé, vous allez me trouver ridicule, mais je ne supporte pas la vue des aiguilles. J’ai peur de tourner de l’oeil. Je suis très fatigué, et… nous revenons d’une soirée assez…

Votre collègue peut vous remplacer ? lui demanda-t-elle, le coupant dans son explication.

Mon collègue ? Ah, oui, Illiah ! Je vais le voir.

Illiah n’était pas entré dans la pièce avec eux. Il s’était vautré sur un des bancs de la pièce attenante, une sorte de salle d’attente. Il semblait dormir. Erié le secoua doucement par l’épaule.

Illiah ! Tu dors ? lui demanda-t-il.

Plus maintenant, marmonna Illiah, en clignant des yeux. Qu’est-ce qu’il y a, c’est fini ?

Euh, non, au contraire. Il faudrait que tu aides la vétérinaire.

Quoi ?

Oui, elle a besoin de quelqu’un pour lui tenir le chat pendant qu’elle lui fait une piqûre. Tu sais que je ne peux par supporter ces trucs-là, et même pas la vue d’une aiguille.

Bon, d’accord, pas de problème, répondit Illiah. Il étira les jambes, puis les bras, comme pour se dégourdir, puis se leva. Tu restes ici ? demanda-t-il à Erié, comme celui-ci s’asseyait.

Oui, viens me chercher dès que c’est fini.

Pas de problème », dit encore Illiah.

Il passa dans la salle d’opérations. Le chat ne bougeait presque plus, seul son souffle, sur un rythme irrégulier, lui soulevait la poitrine en faisant un sifflement effrayant. La vétérinaire sortit une seringue de son étui, et y fixa un longue aiguille. « Cette aiguille est tellement longue, pense Illiah, qu’elle pourrait traverser le chat. » pensa Illiah, en frissonant à cette pensée. La vétérinaire prit le chat et lui fit faire demi-tour, en le laissant couché sur le côté.

Bon, voilà, c’est assez simple, lui dit-elle. Vous allez devoir lui tenir la tête, vous comprenez ?

Pas de problèmes, répondit Illiah.

Allez-y, dites moi quand vous le tenez bien.

Illiah posa les mains sur le cou et sur la tête du chat, et appuya fermement sur la table. Le chat ne pouvait plus bouger.

Je crois que c’est bon, maintenant, dit-il à la vétérinaire.

Celle-ci appliqua l’aiguille de la seringue dans le haut de la cuisse, et la fit rentrer d’un centimètre ou deux. Elle pressa le haut de la seringue pour faire rentrer le liquide ; soit qu’elle touchat un point sensible, soit que Illiah fit un faux mouvement, en appuyant trop fort sur le chat, par exemple, le chat miaula de douleur et cracha devant lui, ce qui surprit beaucoup Illiah. Il relachat sa prise, et le chat, dans un dernier effort, se dégagea complêtement, et lui mordit l’index, enlevant un petit morceau de peau. Le sang se mit à couler de la blessure.

Annie avait ôté la seringue de la cuisse du chat dès le premier mouvement, de peur que l’aiguille ne casse dans le muscle. L’animal avait retrouvé un peu de vigueur, et, se sentant libre, sauta de la table sur le sol. Il avait présumé de ses forces, car ses pattes se dérobèrent sous son poids, au lieu de le soutenir, et se replièrent sous lui, le faisant s’effondrer lourdement sur le côté en poussant de petits miaulements à peine audibles. Tout s’était passé assez vite, et Annie reprit ses esprits la première. Elle prit la main d’Illiah pour la regarder.

Il vous a mordu, non ? Faites-moi voir un peu ?

Oui, au doigt.

Aïe ! C’est bien abîmé ! Ca vous fait mal ?

Non, pas tellement.

Ne bougez pas, je vais chercher un désinfectant et des compresses. Nous allons faire un bon pansement pour éviter de mettre du sang partout.

Je veux bien, répondit Illiah.

Cette dernière remarque lui sembla un peu curieuse. Il y avait du sang un peu partout, déjà. Le chat avait saigné sur le sol et les empreintes rouges de ses pattes traçait un chemin sanglant. Annie était partie dans la pièce adjacente, une sorte de petite réserve. Illiah ne savait pas trop quoi faire, avec son doigt qui saignait. Les doigts saignent beaucoup et celui-là comme tout les autres. Quelques gouttes étaient tombées sur le sol ; la vétérinaire revint avec une bouteille d’un liquide transparent qui semblait être de l’alcool, une boîte de compresses stériles et un rouleau de sparadrap.

Bien, dit-elle, je vais vous désinfecter. Ca risque de faire assez mal, mais pour une morsure comme celle-là, il vaut mieux désinfecter correctement.

C’est vrai », dit Illiah.

Il commençait à avoir un peu mal, et tout ce sang, sans parler de l’odeur des désinfectants, commençait à le mettre mal-à-l’aise. Annie semblait assez peu dans son élément. Elle soignait plutôt des animaux, pas des humains. En désinfectant la blessure, elle avait saisi le poignet d’Illiah et le serrait pour le maintenir comme s’il allait se sauver. Elle n’avait pas une poigne extraordinaire, mais ses ongles commençaient à rentrer dans la peau du bras. Illiah grimaça de douleur ; elle le remarqua et dessera immédiatement son étreinte.

Je suis désolée, je vous ai fait mal, dit-elle.

Ce n’est rien », lui dit-il.

Il aurait vraiment voulu lui sourire, mais n’en avait plus vraiment la force. Annie acheva de désinfecter le doigt sans même tenir le poignet. Puis, au moment de confectionner le pansement, elle se souvint qu’il y en avait peut-être une boîte dans une des armoires de la réserve, qui conviendraient mieux pour cet usage.

Je reviens de suite, dit-elle, ne bougez pas.

Alors qu’elle quittait la pièce, le chat, qui jusque-là n’avait plus fait d’autres bruits que ceux de sa difficile respiration, commençat à râler, toujours allongé sur le côté. Illiah pressentit qu’il n’allait pas tarder à mourir. Son corps était parcouru de tremblements, comme s’il avait le hoquet. Ses râles devinrent de plus en plus faibles, et soudain, sur un dernier un peu plus long que les autres, ils cessèrent complêtement. C’était fini. Illiah n’aimait pas voir souffrir les animaux, et il lui semblait avoir retenu son souffle, sans pouvoir rien faire d’autre, pendant toute l’agonie du chat. Il inspira alors une grande bouchée d’air. Mais ce qu’il croyait être de l’air frais était chargé de milles odeurs qui lui montèrent à la tête. Ses yeux tombèrent alors sur l’extrémité de son index, qui avait recommencé de saigner, et la fatigue, l’alcool, les désinfectants, la blessure, la mort du chat à laquelle il venait d’assister, firent leur effet. Comme la vétérinaire rentrait de nouveau dans la pièce, il s’effondra sur le sol. Elle ne put le rattraper à temps, (il faisait sans doute le double de son poids) mais empêcha au moins sa tête de heurter le sol. Elle prit son pouls, qui était calme. Elle écouta sa respiration, qui était régulière et profonde. Il dormait.

Elle le plaça sur le côté, de manière à prévenir le risque d’étouffement, s’il venait à vomir. Son regard tomba alors sur le cadavre du chat, dont la position ne laissait aucun doute quant à son état. Elle ouvrit un tiroir et y prit un grand sac de plastique noir. Délicatement, elle souleva l’animal et le déposa dans le sac, qu’elle ferma. Après l’avoir posé dans un coin de la salle, elle jeta un coup d’oeil dans la salle d’attente. Erié, allongé sur un des bancs, dormait, comme elle s’y attendait.

Rien ne pressait, après tout. C’était le premier appel de la nuit, et ce serait sans doute le dernier. Elle passa un rapide coup de chiffon sur la table et sur le sol, plia et jeta le carton plein de sang. Elle vint s’assoir derrière un petit pupitre qui occupait le coin de la salle d’opération. Elle ouvrit le cahier de la main courante, tira un trait rouge et inscrivit en formules vagues le compte-rendu de l’intervention. Elle le relut, rajouta quelques accents, le signa, et tira un second trait rouge.

Elle s’était servi un café, et il était resté sur le bureau. Elle porta la tasse à ses lèvres. Le liquide était froid comme la nuit.

Entre Paris et Rambouillet, le 2 Août 2004.